Rares sont les ouvrages en l’honneur d’un Professeur qui réussissent à dresser le portrait d’un territoire, ici la Lorraine, avec tant de précisions, de rigueur et de complémentarité (notons tout de même la contribution de 22 historiens et historiennes). Finalement, un ouvrage à l’image du Professeur El Gammal, que votre humble serviteur a eu le plaisir d’avoir comme enseignant lorsqu’il était encore étudiant à l’Université de Lorraine. Un professeur exigeant et bienveillant qui a poussé Jérôme Pozzi, maître de conférences en histoire contemporaine à l’Université de Lorraine, à organiser ce volume de Mélanges en trois temps. Une première partie consacrée aux « Figures Lorraines », une seconde aux « Cultures et sociétés », enfin une troisième aux « Approches politiques contemporaines ».
Un ouvrage agréable à feuilleter et à lire grâce à la diversité des thèmes abordés, qui nous apportent précisions et anecdotes sur des figures bien connues comme un jeune Barrès négligeant et dénigrant la Lorraine. L’épisode se retrouve dans Les Déracinés : quand Sturel arrive dans la capitale, il crie « A bas Nancy ! Vive Paris ! ». (p.28). A contrario, des figures moins connues sont une réelle découverte comme Claude Huriet, éminent professeur à la Faculté de médecine de Nancy, maire, président de Conseil général, parlementaire et surtout président de l’Institut Curie, dont le portrait dressé est d’une candeur inattendue pour un politique.
On notera également quelques contributions originales qui explorent des champs historiographiques laissés jusque-là en sommeil. En effet, la contribution « A la table du préfet. Administration et commensalité dans la France du 19e siècle » (p.101) nous amène à réfléchir sur l’art d’administrer ; quant à celle sur le Grand-Est et le poids du passé : « 57-Le Parti des Mosellans/Partei der Mosellothringer » (p.313) nous fait réfléchir sur un régionalisme méconnu qui questionne le périmètre institutionnel moderne de la Région Grand Est.
Une contribution de Gabriele B. Clemens nous interpelle toutefois par sa conclusion très personnelle et hasardeuse, qui se démarque du reste de l’ouvrage, par une critique des gender studies sous prétexte que les chercheuses (et non les chercheurs) se concentreraient trop sur : « l’image idéale de la femme émancipée ou téléologiquement émancipée » (p.236).
Il n’en demeure pas moins que cet ouvrage foisonnant et revigorant apporte un autre regard sur la Lorraine qui intéressera par certains chapitres de nombreux collègues.
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