Comment la catégorie d’intellectuel s’affirme-t-elle dans l’espace public en France et en Europe ? Pourquoi passe-t-elle régulièrement par des cycles d’exaltation puis de dénigrement – de sorte que les intellectuels sont rendus responsables des crises que traversent certaines nations au XIXe comme au XXe siècle ? À quel point ces derniers contribuent-ils, par leurs œuvres, leurs circulations, leurs pratiques, à construire une Europe de la culture en dépit de la montée des forces nationalistes ?
Pour répondre à ces interrogations, l’auteur propose une approche renouvelée de figures majeures des deux derniers siècles. Ainsi de Goethe et Émile Zola, écrivains à la renommée véritablement continentale ; de deux musiciens, Hector Berlioz et Franz Liszt, qui s’efforcent, en circulant dans toute l’Europe, de doter leur art de la même autonomie que la littérature ; d’écrivains (Paul Valéry, Jules Romains…), ou d’universitaires (Charles Seignobos, Marc Bloch, Norbert Elias) confrontés à la « guerre civile européenne ».
La diversité de ces cas et des configurations dans lesquelles ils s’inscrivent permet d’éclairer les tensions constitutives d’une Europe où les échanges, en dépit de leur intensité croissante, sont toujours fragmentés et décalés, les dialogues perturbés par les préjugés et les malentendus. Les intellectuels eux-mêmes, divisés entre leur appartenance nationale et leur aspiration à dépasser les frontières, doivent à chaque époque reprendre leur combat pour l’universalisme face à de puissantes barrières économiques, politiques et idéologiques.
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