Tout en cessant d’obéir en esclaves, tout en réagissant contre cette nature qui nous a donné la première impulsion, nous obéissons toujours aux mêmes lois de développement que la terre, et par conséquent, l’harmonie ne cesse pas d’exister entre elle et nous.

Il ne s’agit point de ressemblance parfaite et servile entre la nature et l’homme, comme la ressemblance du visage reflété par le miroir, fait géométrique où la vie ne serait absolument pour rien ; mais de l’harmonie de deux êtres vivants, harmonie qui, se composant à la fois de ressemblances et de contrastes, se reproduit sans cesse par la polarité des forces et oscille autour d’un centre de gravité éternellement changeant.

La terre est vivante, ainsi que le témoignent ces changements continuels qui s’opèrent à sa surface et dans ses entrailles ; l’homme vit aussi, et c’est à la fois du choc et de l’union, des contrastes et des harmonies de ces deux êtres vivants que naît une harmonie suprême que nous appelons l’histoire. [...]

Une nouvelle couche géologique, le sol humain, est venu s’ajouter aux couches antiques déposées sur la terre par la lente élaboration des eaux.

Ce nouveau sol transformé, vitalisé par l’intelligence, envahit de proche en proche toute la surface des continents, et bientôt la vieille ossature du globe disparaîtra complètement sous une enveloppe de villes et de routes pavées, de monuments et de champs en culture.

Déjà, nous contemplons avec admiration dans les villes d’Herculanum et de Pompéi comme un petit échantillon de cette couche géologique humaine ensevelie sous les cendres du Vésuve, mais que sont les deux villes romaines comparativement à ces travaux immenses sous lesquels l’homme enserre la planète !

Maintenant nous pouvons dire que la terre commence à nous appartenir, car nous lui communiquons notre propre vie, et nous employons toute notre intelligence à humaniser ses forces encore sauvages : s’il se pouvait, nous réagirions sur la force de la pesanteur elle-même, et nous harmoniserions notre volonté avec les lois de la gravitation des mondes.