Jeudi 31 octobre, le MRAP et ATTAC Moselle organisaient un ciné-débat sur le documentaire Le Repli, au cinéma le KLUB, à Metz, avec le protagoniste du film, Yasser Louati. L’APHG Lorraine était présente à ce ciné-débat et exprime ici son indignation sur la projection de ce documentaire et les propos tenus lors du débat par Yasser Louati.
Le relais médiatique complaisant à propos du documentaire du cinéaste Joseph Paris inquiète et interroge. Le réalisateur suit en effet le parcours militant de Yasser Louati depuis les attentats de novembre 2015, avec, comme fil rouge, la montée d’un racisme d’État anti-musulman dont l’origine se situerait dans les années 1980, au-delà des clivages politiques droite/gauche. Ce racisme et cette islamophobie d’État seraient les précurseurs de la dérive sécuritaire et autoritaire d’une République sortie des gonds de l’État de droit.
Ce qui interroge fortement ici, c’est la réponse, elle, élémentaire, qui donne son unité à ce documentaire : l’islamophobie d’État, dont les différentes lois concernant la laïcité ne sont que le cache-sexe, est le ressort caché derrière un appareil sécuritaire toujours plus répressif.
La caméra permet à Yasser Louati de mêler sa construction intellectuelle à ses souvenirs personnels : tout part du 13 novembre 2015 où le traumatisme des attentats lui révèle ce qu’il ressent comme une coupure entre les Français de confession musulmane et les autres. Il décide alors de quitter son emploi, de s’engager pour combler un fossé qu’il estime grandissant, de réduire les malentendus grossis par l’hystérie médiatique.
L’élan est noble ; mais, pour atteindre cet objectif, les moyens employés par Yasser Louati sont d’une logique qui déconcertent la prévenance. Pas un mot des manifestations monstres, d’une émouvante dignité, après les attaques contre Charlie Hebdo ; pas un mot sur Samuel Paty ou Dominique Bernard, qui, à eux seuls, justifient l’attention portée à la laïcité et la liberté de conscience à l’école ; pas un mot sur tous ceux qui s’engagent au quotidien, dans le service public ou la société civile, pour faire vivre les idéaux de fraternité.Non. Pour réduire ce qu’il estime un fossé grandissant, Yasser Louati opte plutôt pour le grossissement et l’amalgame de faits très éloignés entre eux, mais devenus intelligibles si l’on utilise cette clé de lecture qu’est l’islamophobie d’État.
La séance de question-réponses après le film a permis à Yasser Louati d’expliciter davantage encore sa pensée, en parlant justement des professeurs. La salle étant acquise à sa cause jusque-là, il a pu ainsi expliquer que les professeurs, en se faisant les garants de cette laïcité à l’école, étaient aussi les agents de cette politique d’État discriminante dans sa manière de « mesurer les jupes des filles ». Puisque, bien sûr, la laïcité se résume à cela.
Il est déroutant, deux semaines après l’hommage à Samuel Paty, de découvrir un documentaire déjà primé et financé par le CNC amalgamer autant de sujets de société sensibles pour en tirer une narration à la limite du complotisme, où les quelques arguments factuels sont orientés dans un sens délibérément trompeur et malhonnête.}
Le Bureau de l’APHG Lorraine
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